La série renversée du massif de la Sainte-Baume

La série renversée se situe dans une même position structurale que les séries para-autochtones décrites précédemment.

Elle chevauche un autochtone présentant la lacune stratigraphique correspondant à l'émersion albo-cénomanienne. Alors que la série renversée contient des formations apto-albiennes " à faciès siliceux ", indiquant une provenance plus méridionale et permettant de prolonger le dispositif observé au sud du massif d'Allauch plus vers l'est.

Elle est chevauchée par un allochtone montrant une série complète avec des formations dolomitiques dans le Néocomien qui le rattache stratigraphiquement et structuralement au chevauchement de l'Etoile et au massif de Carpiagne.

La flèche de charriage observée actuellement est au minimum de douze kilomètres ou de vingt si les massifs de l'Olympe et de l'Aurélien ne sont pas des bordures chevauchantes du bassin de l'Arc mais les extrémités frontales du chevauchement de la Sainte-Baume (GUIEU et ROUSSET 1979).

La série renversée de la Sainte-Baume comprend des formations du Bajocien-Bathonien au Crétacé supérieur, soit un peu plus de 1000 mètres de puissance.
Le renversement des couches s'est effectué vers le nord par un rebroussement produit par le déplacement de la nappe.

Cette série est débitée en écailles par des failles subhorizontales, présentant un léger pendage sud de 15 à 20 degrés. Ces failles provoquent des décalages successifs faisant apparaître plusieurs fois la succession Jurassique supérieur à Urgonien.
Les rejets s'effectuent de telle sorte que le compartiment supérieur est plus entraîné vers le nord que le compartiment inférieur.
C'est la découverte de ces répétitions M. BERTRAND avait relevé dans une coupe ces redoublements :" En effet, quand on fait avec soin la coupe de la partie ouest de la chaîne, on constate jusqu'à deux, peut-être trois fois, sans changement de pendage, l'alternance de marnes et calcaires nécomiens avec les dolomies jurassiques ". Mais il ajoute :" Il est impossible de décider si c'est là le résultat de plis secondaires, ou d'écailles formées par des glissements successifs " (BERTRAND 1900). qui a permis de mettre en évidence ces failles " plates " (CARON et al 1966).

Le long de ces failles " plates ", lorsque le mur de faille est du calcaire urgonien, le miroir de faille peut être observé sous forme de dalles affleurantes qui se suivent presque sans discontinuité. La patine de ces dalles est noirâtre et elles sont suffisamment altérées pour empêcher toute observation microtectonique sur la plupart des affleurements. Toutefois en certains endroits, la surface est décapée.

Près des Escandaou, la brèche de faille s'observe même et elle a fait l'objet d'une étude microtectonique (SUDREAU 1984).
Des cannelures, qui peuvent être considérées comme des stries à plus grande échelle, indiquent un sens de déplacement N145 à N155 du compartiment supérieur. La brèche, elle-même montre des stylolites dans la matrice ou au contact entre les éléments de brèches et la matrice. Les directions de stylolites dans les éléments de brèches ne doivent pas être pris en compte car ils correspondent à la direction de stratification. Et pour certains éléments de brèches des rotations ont dû se produire. De même les " décrochements " affectant les éléments de brèches ne peuvent être considérés car leur jeu n'est qu'apparent.
Les mesures des pics stylolitiques de la matrice montrent une variation continue entre N180o et N140o et une association fentes de traction et stylolites N40o.
Ces mesures pourraient être interprétées comme résultant d'un déplacement avec rotation de sens direct de 40o environ. Mais cartographiquement, la rotation dans la direction des couches est beaucoup moins importante. Cette variation doit donc s'expliquer par un écart dans la direction des pics stylolitiques autour de N160o ou N170o avec une rotation au cours de l'écaillage qui amplifiera cette variation.
Le déplacement de la nappe induit une compression méridienne produisant des stylolites à pics S-N. Lors de la rotation des écailles, ces directions de pics vont suivre le mouvement de rotation pendant que d'autres se forment dans une direction S-N. En ce qui concerne la direction fournit par l'association fentes de traction et stylolites, elle ne semble pas liée au déplacement de la nappe qui se fait dans une direction S-N environ. Aucun élément ne permet d'établir une chronologie relative avant ou aprés la mise en place de la nappe, ni même avant ou aprés le renversement.

Cartographiquement, les lignes d'affleurement correspondent à peu près aux lignes de recoupement entre la stratification et les plans de faille.
Ainsi le dépliage au sein de la série renversée est un peu plus immédiat, par rapport à l'utilisation des lignes de recoupement pour des séries normales. Le dépliage s'effectue en faisant correspondre les lignes de recoupement d'un même niveau repère entre elles.
L'unité la plus sommitale (située au niveau de la crête de la Haute Chaine) présente un rejet de 1,5 Km par rapport à l'unité la plus basale visible. Mais ce rejet estimé précisément est un minimum. D'autres écailles (L'unité du Pin de Simon et le Pic des Corbeaux), désolidarisées de la série renversée par érosion, sont visibles un peu plus au nord entre l'autochtone du Plan d'Aups et l'allochtone de Roqueforcade.

Mais ce rejet estimé précisément est un minimum. D'autres écailles, le Pin de Simon et le Pic des Corbeaux, désolidarisées de la série renversée (la Haute Chaine) par l'érosion, sont visibles un peu plus au nord sous l'allochtone de l'unité de Roqueforcade. Elles nous indiquent que d'autres écailles, plus sommitales, ont été entraînées vers le nord. En utilisant le décalage entre la limite Jurassique moyen-Jurassique supérieur, le rejet entre ces deux écailles et l'unité la plus basale est de 2,5 Km.

La morphologie de la surface de chevauchement peut s'apprécier en reportant l'altitude de quelques points sur le tracé du chevauchement en surface (à partir de la carte géologique à 1/50.000o).
À l'arrière de la série renversée de la Sainte-Baume, il se situe entre la côte 500 et la côte 600 et il pend vers le sud assez fortement .
Latéralement, à l'ouest de la série renversée et au contact des écailles du Pin de Simon et du Pic des Corbeaux, il est presque vertical.
Lorsque la nappe s'appuie sur l'autochtone, le contact est presque horizontal (Roqueforcade et Bassan).
Ainsi donc quand la nappe s'appuie sur des séries entraînées, le contact est très incliné (ce qui rejoint les observations faites dans la nappe de l'Etoile).

Comme dans l'Étoile, la nappe présente un niveau de décollement secondaire dans le Jurassique moyen. Ainsi dans le vallon des Estagnols (au nord de Cuges-les-Pins), une fenêtre de Lias apparaît au milieu du Crétacé inférieur. Le décollement s'observe dans le vallon de Sainte-Madeleine avec un chevauchement de Jurassique supérieur sur du Jurassique moyen.
Ce type de décollement dans la série normale s'interprète comme une séquence de recoupement. L'accumulation de séries entraînées au front de la nappe entraîne son blocage. Le mouvement a donc tendance à se transférer dans un niveau de décollement supérieur. Et comme dans l'Étoile le niveau de décollement se branche sur le chevauchement.


[Page précédente | Page d'accueil | Plan | Page suivante]